Le Commander de Magic The Gathering est le format qui retient mon attention depuis quelques années. Populaire depuis environ 10 ans, le Commander (ou EDH) a été initialement créé par les joueurs, mais très vite, Wizards Of The Coast a senti le filon et s’est mis à proposer des produits et à encadrer cette nouvelle façon de jouer.
Il existe de nombreux modes de jeu dans Magic, mais pour les besoins de cet article, nous allons discerner 3 grandes familles : le jeu classique, le draft et le commander.
Le jeu classique propose aux joueurs de composer un deck de 60 cartes (ou plus), comprenant jusqu’à 4 exemplaires d’une même carte, en se limitant à l’un des formats existants : le standard (l’un des plus restreint, car collant à l’actualité), en passant par le pioneer, le modern, le legacy et le vintage, jusqu’au freeform qui accepte toutes les fantaisies.
Le Draft est un format plus événementiel, puisqu’il consiste à ouvrir des boosters en commun, pour y piocher à tour de rôle afin de fabriquer un deck éphémère de 40 cartes. Très amusant pour quiconque souhaite passer une bonne soirée, sans se prendre la tête sur des questions de format, de niveau de puissance, ou de coût. 3 boosters par joueur, on fait tourner, on ajoute des terrains, et on commence à jouer. Un mode de jeu apéro, en somme.
Le Commander est un format à 100 cartes uniques (sauf terrains de base) dont nous allons détailler les spécificités.
Bien choisir son guide
Créer un commander, nécessite en premier lieu, de choisir un commandant, qui sera une carte de créature légendaire (ou n’importe quelle carte indiquant qu’il est possible de la jouer en commandant). De cette carte découlera les couleurs utilisables en jeu, il ne sera donc pas possible d’utiliser des cartes bleues avec un commandant rouge et blanc, sauf si ce symbole apparait dans le texte de capacité de la carte:
Très souvent (mais ce n’est pas une règle), la mécanique de la carte de commandant va dicter la mécanique globale du deck. Il est logique de créer une certaine synergie autour de la carte de commandant car cette dernière ne se trouve pas dans le deck mais dans une zone appelée : zone de commandement. Lorsqu’elle s’y trouve, elle est comme hors -jeu, mais il est possible de payer son coût d’invocation à tout moment pour la poser sur le champs de bataille, et ainsi retrouver le fonctionnement classique d’une carte Magic.
Elle possède tout de même des spécificités:
- Si le commandant est placé dans le cimetière ou à l’exil, son contrôleur peut décider de la laisser ainsi ou de la renvoyer en zone de commandement. Il pourra ainsi la ré-invoquer, moyennant un cout majoré de 2 mana incolores par retour en zone de commandement (ce qui peut vite devenir cher).
- Lorsque le commandant inflige un total de 21 blessures de combat à un joueur, ce joueur perd la partie, même s’il lui reste des points de vie.
Une seule carte
L’originalité du Commander, c’est qu’il ne comporte qu’un seul exemplaire d’une carte, là où les autres formats autorisent jusqu’à 4 cartes identiques. Une seule carte c’est peu, il faut donc chercher un moyen de contourner le problème, et pour cela, il est possible de piocher dans l’intégralité des cartes parues depuis 30 ans. L’intégralité moins 86 cartes environ, bannies pour X raisons (carte raciste, carte cassée…). Ce qui en fait le format le plus étendu après le Freeform (qui n’est au final, qu’une façon officielle de dire aux gens qu’ils ont aussi le droit de jouer à Magic comme ils le souhaitent, y compris n’importe comment). Pas de restrictions, pas de rotation, pas de révolution tous les ans. Le commander est un des formats les plus stables de Magic, et il y a fort à parier que, si vous avez construit un deck imblocable il y a 10 ans, il sera toujours aussi cool à joueur aujourd’hui, (sauf si vous jouez en compétition, mais bon).
Un exemplaire d’une carte, ça demande d’être inventif, d’aller fouiller pour trouver des effets proches, pour jouer des cartes qu’on connait pas, pour casser les habitudes, et la construction d’un deck commander est toujours un moment stimulant, surtout qu’avec 99 cartes + 1 commandant, il y a de la place (surtout pour le hasard).
Un plan de jeu plus souple
Un deck de 60 cartes, contenant jusqu’à 4 exemplaires d’une même carte et environ 20 terrain, signifie que la stratégie que l’on souhaite mettre en place est assez rigide. Lorsque l’on pioche ses 7 cartes, on s’attend à avoir de quoi mener à bien son plan de jeu, et de quoi répondre à la menace que représente l’adversaire. Un deck de 100 cartes avec un unique exemplaire de chaque carte et entre 35 et 40 terrains, ça n’est pas la même tambouille. Ça implique plus de souplesse dans son approche, plusieurs possibilités de jeu, plusieurs variantes dans le plan de jeu. La part d’aléatoire est plus grande et apprendre à la réduire est ce qui fait le sel du Commander.
De votre capacité à construire un tout cohérent, à réduire l’aléatoire et à mettre de la thune dans des cartes improbables, va découler le niveau de puissance de votre deck. Une indication mise en place par les joueurs pour définir à la truelle, la compatibilité des decks entre eux.
La chaine youtube : La tour de commandement, spécialisée dans le Commander, a sorti en 2022, une vidéo sur l’évaluation des niveaux de puissance qui est assez intéressante.
Pour faire rapide, les decks sont notés de 1 à 10 : si 1 correspond à un tas de cartes, 5 est l’équivalent d’un deck préconstruit (non-modifié) trouvable dans le commerce, 6 représente un deck réfléchi, avec une ou des synergies qui fonctionnent, mais peu tourné vers la gestion de l’adversaire, 7 inclut cette gestion, 8 est optimisé, possède des tuteurs de cartes et vise l’efficacité sans pour autant intégrer la méta du jeu (les tendances en compétition et comment éclater ces tendances). 9 et 10 sont réservés au Commander de compétition (CEDH), uniquement joué en duel et visant des victoires tour 1 ou 2. Ici, on se trouve très éloigné du fun et de la convivialité.
Cette notation est plus une sorte d’indication, pour que nous soyons en capacité de dire si un deck va rouler sur celui des copains ou pas. Dans l’optique d’une soirée de jeu entre potes, sortir un deck qui va atomiser tout le monde n’amuse personne, alors on s’adapte, et il n’est pas rare qu’un joueur de commander possède des decks de niveaux variables, pour jouer selon les circonstances, en toute connaissance de cause.
A titre personnel, j’ai des decks qui vont du niveau 6 à 7, voir qui lorgnent vers le 8 et je ne les utilise pas pour la même chose. J’ai des decks qui ne gagnent pas, ou pas souvent, mais qui pimentent la partie et avec lesquels je passe un bon moment. Ils peuvent se révéler redoutables en équipe, mais ne visent pas la victoire implacable. J’en ai d’autres qui n’existent que pour réduire le confort de vie de mes adversaires. J’en ai qui sont plus efficaces en duel et d’autres en multi. Je n’ai pas l’intention d’améliorer mes decks les plus « faibles », parce qu’il y a toujours un joueur qui débute ou un pote qui construit un nouveau concept et qui a besoin de tester son jeu sans se faire éclater. Et puis des fois c’est juste marrant de jouer un concept original mais dont on sait qu’on est pas en capacité de l’optimiser suffisamment pour que la victoire soit systématique.
Une orientation multijoueurs
Le commander vise le multijoueurs, une philosophie différente du jeu classique qui vise le duel. Il existe bien entendu des variantes multijoueurs pour le jeu classique (troll à deux têtes, Archenemy etc), mais ce sont des variantes (que l’ont peut d’ailleurs jouer en Commander) et non le cœur du jeu. Les parties sont plus longues, peuvent subir de nombreux retournements de situations. La politique y tient un rôle important et il n’est pas rare d’assister à des négociations entre joueurs afin de créer une coalition temporaire. Alliances et trahisons sont légions, car tout est bon pour survivre, même si à la fin, il ne peut en rester qu’un. Il existe même des decks qui misent essentiellement sur la politique avec des mécanismes de boost collectif et de récompenses/sanctions en proposant des choix constants (les Group Hug).
D’autres misent sur le chaos général, en provoquant des effets indésirables pour toute la table, chaos duquel ils sauront tirer bénéfice afin de massacrer joyeusement ses camarades de jeu.
Il s’agit là de quelques exemples parmi l’océan de possibilités qui s’offre à vous. Le commander est un mode propice au grand n’importe quoi, et c’est toujours réjouissant d’arriver à une table avec un deck débile.
Le commander coûte moins cher
Non c’est faux. Si vous voulez économiser de l’argent, ne jouez pas à Magic The Gathering.
Cependant, comme un deck Commander n’accepte pas plusieurs exemplaires d’une même carte, vous ne vous confrontez pas au problème du carré de cartes à 5 euros essentiel au bon fonctionnement du deck. Que vous achetiez un deck ou que vous le fabriquiez de zéro, vous allez devoir investir dans des cartes. Comme pour les autres modes de jeu, le budget va dépendre de votre degré d’implication et du niveau de puissance que vous voulez atteindre.
Mais si votre but, c’est de jouer avec un pote, vous pouvez simplement acheter deux decks préconstruits et ne jamais les modifier: Wizard Of The Coast en met régulièrement en vente, et ils sont carrément cools à jouer en l’état, contrairement aux espèces d’immondices qu’ils proposaient par le passé.
Commander : un format intéressant
Magic The Gathering vous fait de l’œil mais vous trouvez ça trop compliqué, trop vaste, trop cher, tentez le commander en préconstruit, vous aurez un bon aperçu de la profondeur du jeu, sans les contraintes inhérentes aux formats, sans la rigidité du jeu classique et en troquant l’orientation compétition contre un délire plus « jeu de société ». Ensuite, libre à vous de vous cantonner à cela, ou de contracter un prêt à la consommation afin de progresser sans contrainte dans votre maitrise du jeu.
D’ailleurs j’en profite avant de terminer pour vous rappeler que, fin Juin 2023, arrive l’extension sur le Seigneur des anneaux, et qu’un lot de 4 Commanders préconstruits sont annoncés. Ils ont l’air canon et proposeront un certain nombre de rééditions notables et des illustrations assez splendides.
Il est déjà possible de les précommander chez notre partenaire si vous voulez vous faire plaisir :