La société espagnole de l’après-movida c’est un peu Tapas et prozac si l’on en croit les livres de Lucia Etxebarria. Cette semaine, je vous parle du roman Amour, Prozac et autres curiosités de Lucia Etxebarria et du jeu Tapas de Ludovic Lepine.
Amour, Prozac et autres curiosités
Lucia Etxebarria est un véritable ovni en Espagne : elle témoigne avec folie et sans fausse pudeur de la société espagnole de l’après-movida tout comme Pedro Almodovar au cinéma.
« La vie devrait être comme une éphéméride. Tous les jours, on devrait pouvoir en arracher une page pour en commencer une autre en blanc. Mais la vie est comme une couche géologique. Tout s’accumule, tout compte. Toute chose a une influence. Et l’averse d’aujourd’hui peut annoncer le tremblement de terre de demain. »
Amour, Prozac et autres curiosités est un kaléidoscope de la vie de trois sœurs, différentes à bien des égards, mais si semblables dans leur questionnement de la vie. Leurs existences sont faites de hauts et de bas, d’histoires d’amour compliquées.
La vie en général est comme la queue au supermarché : lente, pas pratique, et pleine de gens insupportables.
Ana, Rosa et Cristina, ont-elles des points communs ? Leur père a quitté le domicile conjugal sans explications alors qu’elles étaient toutes jeunes, les laissant avec ‘une mère pharmacienne, glaciale, autoritaire et distante(page 64)
Elles font de leur mieux mais elles galèrent pas mal, surtout avec les hommes.
« Tu vivras de nombreuses passions, disait ma carte astrale, me plaçant sous l’ascendant d’amours intenses et fugaces. Un rosaire de noms reliés par des baisers, certains sobres, d’autres plus tendres. Ils sont plus ou moins grands, châtains ou bruns, il y en a de toutes sortes. Un trait commun les définit tous, la virilité qui s’agite avec inquiétude entre leurs jambes.«
Chapitre après chapitre, chacune des trois sœurs prend la parole pour se livrer. Trois femmes aux vies radicalement opposées : la fêtarde, la mère au foyer, et la directrice financière.
Christina, la benjamine du trio, est de loin la plus effrontée. Elle consomme les hommes avec la même ardeur que l’ecstasy, se laisse aller à l’excès, tentant de noyer un profond désespoir.
« Les rares moments où il n’y a personne au comptoir, je ferme les yeux et j’essaie de me concentrer sur les sons synthétisés, en visualisant la musique comme un oignon iridescent auquel, lente et consciencieuse, j’enlève les couches, l’une après l’autre, jusqu’à en trouver une spécialement conçue pour moi : le cadeau de la rave music. Et quand je la trouve, je la fais monter dans mes veines, mes capillaires et mes artères, parcourir mon corps en se mêlant à ma lymphe et à mon sang, remonter vers ma tête, m’inonder complétement.«
Anna, la fée du logis, mariée et mère exemplaire, passe ses journées à soigner sa petite famille pour cacher sa tristesse.
« La tristesse s’étend comme une tache d’huile, lente et indélébile. Je ne trouve pas de chiffon pour me nettoyer l’âme. Cela fait un mois que je pleure sans arrêt et que je mange à peine. Toutes les nuits, je vais au lit et je pleure, je pleure, je pleure. Je pleure en silence, des larmes salées qui glissent sur mes joues comme des gouttes de pluie sur une vitre. »
La dernière, Rosa est “executive-woman » : pas de place pour l’amour.
« La plupart des gagnants ont un jour pris la décision de s’attaquer au sommet, ils mettent un terme à toutes les relations privées susceptibles d’être cause d’équivoques.«
Que retenir de Amour, Prozac et autres curiosités ?
Que l’amour offre plus de déceptions qu’autre chose et que le monde du travail est dévalorisant…triste constat.
Mais alors, que faire ?
En bonne épicurienne, Lucia Etxebarria nous propose de savourer chaque moment et d’aborder la vie avec plus d’humour
« Le temps s’arrête dans ma tête et l’espace d’ un instant je cesse d’être cette grande fillette que je suis et je me transforme en super Ana, affrontant cette meute de bonbonnes à coups de boîtes de conserves,et je mets hors combat la caissière d’un coup bien asséné sur le chignon avec une boite d’asperges au naturel.«
Mais le véritable génie de Lucia Etxebarria c’est son écriture rythmée, piquante et déjantée pour aborder les sujets les plus délicats de nos existences entre métro boulot et dodo…vous reprendrez bien des Tapas?
Amour, Prozac et autres curiosités de Lucia Etxebarria.
Tapas
Tapas est un jeu tactique et abstrait pour exclusivement deux joueurs sur le thème des fameux amuse- bouches ibériques. L’idée c’est de s’affronter à coup de Croquetas et Jalapeños.
Votre but ici est de positionner vos tapas sur le plateau tout en repoussant ceux de votre adversaire. Il va falloir sortir ses tapas pour marquer des points, mais il va falloir aussi être prudent : chaque fois que des tapas sont éjectés, chaque joueur récupère les tapas de son adversaire, peu importe qui les a poussés hors du plateau.
Pour placer un tapas sur le plateau, positionnez-le derrière un tapas adverse et poussez-le en ligne droite d’un nombre de cases équivalent à sa valeur. Si d’autres tapas se trouvent sur la ligne, ils se décalent également.
Des contraintes stratégiques ajoutent du piquant : il est interdit de poser votre tapas sur une ligne vide ou de vous positionner entre deux tapas ou de pousser l’un de vos propres tapas en entrant sur le plateau ou de repousser une ligne dans le sens inverse immédiatement après l’avoir poussée.
La partie prend fin une fois que vous avez tous les deux joué vos 10 tapas. À la fin, comptez les valeurs des tapas adverses.
Un jeu aussi rapide que tactique : c’est minimaliste, les règles s’expliquent en 2 min, le temps d’attendre les prochains Tapas…
Tapas un jeu de Ludovic Lepine, illustré par Philippe Nouhra et edité par Funforge