La team de Régis Bonnessée a vécu une semaine épique, entre la présentation du jeu à Cannes au grand public, et la fin du Kickstarter. Beaucoup d’émotions pour ce projet géré de main de maître dans plusieurs aspects. Et un record sur Kickstarter pour ce type de jeu : le jeu de cartes à collectionner ou JCC. Voici les raisons d’un tel succès, selon moi
6,2 millions, boum
Les chiffres de fin de campagne :
- 6 213 305 € engagés
- 14 997 contributeurs
Des chiffres vertigineux, à mettre en rapport avec d’autres campagnes pour des jeux de société sur les plateformes de crowdfunding :
Nom du Jeu | Montant Financé |
---|---|
Nemesis: Retaliation | 13 858 541 $ |
ISS Vanguard | 11 957 533 $ |
Frosthaven | 12 969 608 $ |
Kingdom Death | 12 393 139 $ |
Avatar Legends | 9 535 317 $ |
7è continent | 7 072 757 $ |
Tainted Grail: Kings of Ruin | 7 539 895 $ |
The Witcher: Path of Destiny | 6 944 880 $ |
The binding of Isaac For Souls | 6 720 471 $ |
Castles of Burgundy: Special Edition | 5 751 801 $ |
The Elder Scrolls: Betrayal | 4 683 008 $ |
Un succès extraordinaire pour un JCC, stratosphérique même, qui va donner à Equinox les moyens de développer son jeu, de donner du travail pour longtemps à toutes ses équipes. Je pense à Yoshiaki Mimura par exemple qui a écrit 180000 mots pour le lore d’Altered, et qui a maintenant (probablement) l’assurance de pouvoir développer l’univers d’Altered sur plusieurs saisons.
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Les raisons du carton d’Altered
Un jeu moderne
Altered dépoussière le JCC avec plusieurs mécaniques innovantes.
Dans son gameplay déjà, qui ne propose pas une ligne de séparation horizontale d’affrontement entre les joueurs, dans un face à face vertical symétrique. Altered propose un gameplay d’exploration horizontale, donnant ainsi un écho dans le gamedesign même à sa volonté de changer les codes. On fait la course, on ne se bat pas. Par ailleurs, Equinox a su mettre aux postes importants des personnes avec un haut-niveau de compétitivité dans d’autres JCC, dotées d’une expérience plus que nécessaire pour concevoir des mécaniques équilibrées.
Dans son économie aussi, avec de véritables révolutions. Chaque carte d’Altered possède un QR Code, que vous scannerez à l’ouverture de votre booster, ou dont vous transférerez la propriété grâce à l’appli dédiée. Il fallait du courage pour oser se frotter à des principes qui rappellent l’extraordinaire période de scam des NFT et de la crypto. Altered a réussi à convaincre que rien de tout ça n’entacherait son jeu, qu’il n’y avait ni spéculation ni quoi que ce soit du genre. Juste une façon de nouvelle de gérer ses cartes, en ayant la possibilité de faire du print on demand.
Votre carte est abîmée, vous l’avez paumée ? En quelques clics vous la commandez et elle arrive chez vous par la poste.
Mais derrière cette mécanique utile aux joueurs, Altered donne une leçon à toute l’industrie du TCG, en redevenant bénéficiaire de toutes les transactions. Un mesure d’autodéfense face aux scalpers et une ré-appropriation de sa propre économie. Equinox va gagner de l’argent à chaque impression à chaque échange/vente de carte sur l’appli et ne se contentera plus de vendre des boosters.
Dans son système de rareté, avec les cartes uniques qui sont un gamechanger : Altered brise les habitudes de deck-lists toutes faites que tout le monde joue. Oui, des cartes vraiment uniques au monde. Tous les 8 boosters. Place à la surprise avec les cartes uniques, à l’improvisation et à l’adaptation. Vous ne pourrez en mettre que 3 dans votre deck, mais elles peuvent vraiment tout changer.
Avec tous ces ingrédients, Altered a planté les bases de son succès je pense, en rentrant aussi, grâce à l’appli centrale au projet, dans le téléphone de ses clients, au quotidien.
Un jeu inclusif et positif
Altered a su proposer un autre mood, une autre approche, qui ne repose pas sur la confrontation guerrière. Dans Altered vous incarnez des factions qui ont un objectif commun, l’humanité fait front et vous y participez. Dans le design de ses héros ET de ses héroïnes, dans ses choix graphiques, Altered embarque de multiples archétypes, dans lesquels une multitude d’humains peuvent se reconnaître, se projeter. Quand il atteindra une proportion encore plus internationale, il sera prêt et son côté multiculturel pourra plaire à toute la diversité d’humains qui voudront y jouer.
Dans son propos, Altered porte des valeurs positives de solidarité, d’entraide et d’exploration, qui sont finalement assez fraîches après des années de baston sur MTG ou Yu-gi-oh par exemple. Et si il est trop tôt pour savoir si l’histoire racontée atteindra des sommets, on comprend déjà la posture.
Un univers référentiel
Porté par une volonté de Régis Bonnessée (le papa de Dixit) de travailler avec des artistes, Altered nous fait explorer un univers à la croisée des chemins entre plusieurs univers. Des îles flottant dans le ciel de Miyazaki aux héros de la Horde du Contrevent, les références que l’on devine sont balancées dans un shaker de modernité, par petites touches car Altered est avant tout un jeu de cartes qui se raconte sans mots.
Je suis personnellement encore un peu réservé sur les visuels d’Altered. Si certains sont dores et déjà iconiques comme cette baleine majestueuse sortant des nuages, le commun des illustrations des cartes se cherche encore j’ai l’impression, avec une légère impression de cul entre deux chaises. La qualité du travail n’est pas à remettre en question, loin de là, c’est tout juste phénoménal.
Mais je ressens sur la moitié des cartes une espèce d’excès d’effets visuels, de 3D de textures et d’éclairages, alors que j’ai personnellement envie d’une forme de pixel art ou de simplicité sauce Altered. Ce n’est que mon goût personnel. L’autre moitié restant vraiment fulgurante de beauté !
Une communication au top
La dernière raison du succès d’Altered, c’est sa communication à mon sens ultra bien gérée. Pour un site de presse comme Campustech, un seul email envoyé et j’avais le contact de toutes les personnes aux postes-clés. J’ai pu m’entretenir avec Yoshiaki Mimura, avec Régis Bonnessée et d’autres choses sont prévues. La team répond au téléphone, se rend disponible.
Sur les réseaux, Altered a su fédérer une communauté via un discord très suivi, et un compte insta à taille humaine. Pas de blabla, pas de bombage de torse : des humains enthousiastes, des joueurs qui partagent leur jeu.
Une omniprésence du kickstarter dans les médias, des rapports professionnels avec la presse ultra efficaces ont aidé a propulser Altered sur le devant de la scène. Une belle présence dans les salons comme Vichy, Essen ou Cannes en complément.
D’ailleurs, savez-vous que dans une semaine sort un autre JCC, Star Wars Unlimited ? J’ai l’impression qu’une éclipse est venue cacher l’Etoile Noire moi…
Il reste à Altered à passer l’épreuve ultime de tout JCC : être suffisamment bon pour perdurer plus d’un an. Les calculs sont bons, Kévin Régis !