Quand j’ai posé les yeux sur Newsboys, j’ai immédiatement su que c’était un jeu pour moi. Une espèce de finesse et d’élégance transpercent ce jeu de part en part. Newsboys est un jeu à cocher d’un classicisme absolu, dont l’épure et la forme respirent le Japon. Voici donc mon avis et ma critique de Newsboys.
Un pur Saashi & Saashi
Chopé à Essen avec à peu près tous les jeux disponibles au catalogue de Saashi & Saashi et de Oink games présents sur leur stand, j’étais curieux de découvrir cette petite pépite. Déjà parce que le jeu incarne tout ce qui fait de Saashi & Saashi un éditeur que j’aime bien : une sorte de douceur graphique, un côté complètement épuré rétro japonais. Des polices aux traits de visage des protagonistes, des ambiances chelous et vintage d’un autre monde.
Pas de combat de monstres ou de programme pour sauver le monde chez Saashi & Saashi. On joue à des oeuvres dont les enjeux sont humains, réalistes. On est dans le quotidien. Newsboys vous permet d’incarner des livreurs de journaux. In front of the elevator simule une attente devant l’ascenseur. Souvenirs fait appel à vos souvenirs de voyage.
Une énergie super douce et originale se dégage de ces oeuvres, je la comparerais au travail de Taniguchi en BD. On est dans la tranquillité, dans le quotidien, on est un loin des problèmes du monde. Takako Takarai livre ici encore une fois la quintessence de sa patte graphique : une naïveté absolue, une personnalité inouïe. C’est très clivant et je comprends que plein de joueurs détestent. Moi je la trouve géniale. C’est d’ailleurs l’épouse de Saashi et elle co-dirige l’entreprise avec lui.
Bon, maintenant quand on ouvre la boîte qu’est-ce qu’on trouve ? Déjà des plateaux cartonnés et effaçables, super jolis et épais (mais propices à la déformation). Des cartes au format miniature avec des symboles. Des dés qui reprennent ces mêmes symboles. Même les dés sont hyper ronds et doux, et il n’est pas rare de les lancer et qu’ils s’arrêtent sur la tranche.
L’élégance faite jeu
Newsboys adopte une formule très classique de jeu à cocher. A chaque tour, les joueurs vont lancer des dés, qui comportent des couleurs et des symboles associés. Et une carte sera retournée, révélant elle aussi des couleurs et des symboles.
Le dos de la prochaine carte est aussi pris en compte. Ces couleurs représentent des groupes de cases sur le plateau à cocher. Dans chaque groupe figure un type de bâtiment : usine, bureau, commerce. Oui car vous êtes des livreurs de journaux et vous livrez ces entreprises.
Le gameplay tend à l’épure : à son tour chaque joueur lance 3 dés, avec une relance possible, et fait le total des faces de ses dés et des faces des cartes d’une des couleurs : ce sont autant de cases qu’il pourra cocher sur son plateau.
Sur ce plateau, différents quartiers sont à compléter, et d’autres jauges vous apporteront des points si vous cochez certains symboles. Les zones de couleurs vous apportent une coche bonus quand vous les complétez. Coche bonus que vous pouvez mettre dans une autre zone, et déclencher ainsi un combo de coche et de bonus.
Mais vous pouvez aussi mettre cette coche bonus dans une jauge grise. Le twist principal est donc ce jour de paye : une jauge à cocher case par case, qui limite vos points si vous ne le faites pas. Vous devrez donc investir des coches dans cette jauge pour ne pas être trop limité en bonus.
Cocher un type de chaque bâtiment déclenche des jours de paye pour vos coursiers : vous marquerez alors des points en fonction des symboles dollars cochés sur le plateau, mais dans la limite de la jauge grise
Il n’y a rien d’exceptionnel dans Newsboys : toutes ces mécaniques ont été vues et déployées avant lui. Il n’a pas la virtuosité de Welcome to the Moon, il n’a pas l’originalité de Dungeons, Dice and Danger.
Mais l’assemblage de Newsboys a une saveur particulière, une espèce d’alchimie toute simple qui rend le jeu très appréciable et très rejouable. Pas pour des centaines de parties : mais un petit Newsboys de temps en temps, oui ! Et c’est limite un objet culturel. C’est un jeu que je qualifierait de dépaysant.
Le mochi de Proust
Newsboys, j’en ai fait une vingtaine de parties, et il se dégage une aura de rejouabilité marquée. Pourtant il n’y a qu’un plateau, qu’un gameplay simple. Mais on a envie de s’y frotter. Les jeux ont parfois des synergies subtiles, faites d’une combinaison matérielle, visuelle, tactile et mécanique. Newsboys en fait partie pour moi.
Newsboys n’est pas le meilleur des plats gastronomiques, ce n’est même pas le plat d’un chef étoilé. Newsboys c’est le petit chocolat avec le café, c’est votre petit biscuit préféré.
Paper Saashi
Si vous cherchez un jeu à cocher, ce n’est pas Newsboys que je vous conseillerais. Déjà parce qu’il est introuvable ou presque (merci, que des génies sur campustech), et parce qu’il faut jouer à d’autres choses avant lui. Avec ses petits défauts, comme ces plateaux qui gondolent, ou ce manque de profondeur, Newsboys n’est pas le premier de la classe.
En revanche si vous aimez les jeux à cocher, que vous en avez plein, ou que vous avez un petit penchant pour la culture japonaise : alors là foncez. Newsboys est un condensé de bonnes choses, un gameplay simple, un jeu accessible dès 8-10 ans, et des sensations bien à lui.