Offrez-vous le plaisir de donner vie aux espèces animales et végétales dans ce jeu au thème fort et à la mécanique surprenante. Je vous livre mes impressions sur Dame Nature.
La toile de fond
Un nouveau titre fait son apparition dans la gamme Nature chez l’éditeur tant apprécié Opla qui nous offre l’opportunité d’aborder des thèmes sérieux et importants pour l’avenir de notre planète sans se montrer moralisateur ni nous faire complexer à mort, juste en rappelant l’essentiel au travers de sujets sensibles et en jouant sur la cohérence du matériel et/ou des mécaniques.
Libre à nous ensuite de nous sentir suffisamment concernés pour lire la petite documentation systématiquement fournie dans la boîte et travaillée avec des partenaires engagés pour la cause. A propos de Dame Nature, c’est avec l’association FNE Rhône (France Nature Environnement) que l’alliance s’est faite afin de nous faire profiter de ses connaissances en matière de sauvegarde de la Nature et l’Environnement dans un soucis de développement durable.
Ici pas de pollution, de vilains humains tout méchants pas beaux avec leurs usines à la noix (en tout cas pas tout de suite …). Le sujet est plutôt de repartir à la source et de reconstituer la trame du vivant en partant de la toute petite graine pour arriver aux grands prédateurs. Ensemble, sans se parler, les joueurs doivent se synchroniser et s’adapter aux contraintes changeantes pour parvenir à équilibrer les éléments et respecter les besoins de chacun pour vivre en harmonie.

Tissons des liens
A la lecture des règles, je me suis dit « oh non quel dommage, ça ne marchera jamais ! On va jouer au pif et ça n’aura aucun sens … ». Et puis je me suis souvenue m’être déjà posée la question à propos de certains scénarios de Bomb Busters qui est finalement devenu le jeu ayant marqué mon année 2024 et pour lequel je n’ai absolument aucun reproche à faire ! ( Bon désolée, là niveau thème, on s’éloigne un peu du charme de Dame Nature !).
J’ai donc décidé de m’assoir sur mon jugement afin de tenter l’expérience en y mettant tout mon coeur et en invitant deux amis passionnés de jeux ainsi qu’un cobaye, mon conjoint, pas plus adepte que ça de la chose ludique … Si le principe paraît simple : poser des cartes dans un certain ordre logique pour faire apparaître les bonnes espèces au bon moment ; la réalisation nécessite de bien se coordonner, s’observer et se comprendre. C’est en réalité là que se cache vraiment le jeu !
La communication étant limitée, les participants bénéficient de peu d’actions leur permettant de transmettre des infos ou d’échanger des cartes, encore faut-il savoir quelle donnée est réellement importante à l’instant T et pour plus tard mais aussi avec qui faire un troc valable. Croyez-le ou non mais il se passe un truc un peu magique comme dans tous ces types de jeux ou la contrainte principale est de rester bouche cousue !
Avec Dame Nature, on apprend à savourer le silence et être attentif aux réactions plus ou moins vives, déduire les éventualités selon la rapidité d’exécution de l’un et l’hésitation de l’Autre, comprendre les décisions secrètes, profiter des données visibles et partager nos émotions. Ca c’est pour les parties en elles-mêmes mais il faut savoir que ce qui se passe entre les manches est tout aussi important : on s’explique, on justifie son choix, on écoute ceux des autres, on se met d’accord pour obtenir de meilleurs résultats et on s’encourage. Même mon cher et tendre qui ne joue qu’occasionnellement et nous fait souvent profiter de son esprit critique et plutôt compétiteur a grandement apprécié. C’est même son enthousiasme toujours intact après deux échecs qui nous a motivé à réitérer et passer les niveaux supérieurs.
Et pourtant, si vous croyez que (le jeu de)Julien Prothière est gentil, détrompez-vous : ne gagneront que ceux qui auront tissé les mailles du vivant de l’Herbe à l’Aigle en gaspillant un minimum de Ressources vitales défaussées lorsqu’un joueur ne peut placer sa carte à son tour.


Ne te découvre pas d’un fil
Pour que l’expérience soit vraiment réussie, il est donc primordial d’apprendre à bien communiquer mais attention, il ne faut pas se dévoiler complètement non plus. Allez, soyons honnête : ça vous arrivera ! C’est de la triche, mais vous en rigolerez et voudrez aller au bout du défi, c’est normal ! Rien de grave … A mon sens, c’est un des aspects amusants des jeux coop’ encore plus quand la communication est restreinte : c’est tellement drôle de voir à quel point nous ne sommes pas habitués à échanger autrement qu’avec la parole. Donc voilà, parfois ça fuse et il ne faut pas s’autoflageller pour autant, personne n’ira en prison et au pire : il suffit de retenter le niveau sans vriller cette fois (et au mieux : vous aurez une anecdote rigolote rien qu’entre-vous !).
Les niveaux, parlons-en : dans Dame Nature, la réalité environnementale est mise sur le devant de la scène. Ca reste un jeu, il n’y a pas vraiment de pédagogie qui s’immisce l’air de rien au centre de la table, toutefois le message de prévention et de sensibilisation, lui, est bien présent et c’est plutôt une qualité ! Quand après une ou deux (ou trois !) parties, vous aurez réussi le premier challenge proposé ; de nouveaux éléments viendront s’ajouter, matérialisés par d’autres cartes et/ou des symboles dont vous n’aviez pas tenu compte jusqu’ici. L’équilibre est alors bousculé par ces nouvelles données et nécessite que le groupe s’en acclimate (ah ah !).
La biodiversité doit nécessairement être respectée pour gagner la partie, les joueurs doivent donc faire preuve de plus en plus de capacités d’adaptation, d’observation, de programmation et de réactivité ! Petit à petit, la difficulté monte d’un cran et le petit jeu de cartes vachement mignon et coloré, montre subitement ses dents !
Chaque nouveau chapitre (4 en tout) introduit 3 variantes à ajouter au fil des manches (il est tout à fait possible d’en ignorer mais on perd un peu l’aspect cohérent du truc … néanmoins, ça ne gâche pas le jeu pour autant). On trouvera entre-autres de nouvelles conditions à respecter pour faire apparaître la vie maritime, d’autres qui, si elles ne sont pas exploitées rapidement, disparaissent ; l’impact des humains (tiens les voilà …) mais aussi des espèces invasives etc. Je ne vais pas tout vous dévoiler, le principal plaisir de ce type de jeux étant la découverte et le challenge apporté par les nouveaux défis.


Des mailles solides
Pour une surprise, c’est une surprise ! Dame Nature nous a plus que convaincus et motivés à poursuivre l’aventure après un démarrage plutôt sceptique. C’est finalement devenu le petit rituel de notre groupe de 4 (possible jusqu’à 6). Désormais, quand on arrive à se retrouver, on commence toujours par retenter un défi qui nous a donné du fil à retordre ou alors on passe au point suivant car Dame Nature est en réalité comme l’ouvrage d’un tricot : toujours en perpétuelle évolution !
En parlant de création : si la couverture sur la boîte me laissait plutôt insensible au départ, elle a finalement, après quelques parties à apprécier le travail sublime, minutieux et éclatant de David Bonnifacy ; trouvé grâce à mes yeux notamment dans les détails attendrissants que je n’avais même pas vus à la base. Peut-être que c’est ça finalement tout l’intérêt des jeux de la gamme Nature : nous apprendre à la regarder autrement, prendre le temps d’en apprécier les petites subtilités, bénéficier de toute sa force, repartir plus grand et un peu meilleur même, on l’espère !

