Le jeu de société s’est tellement développé ces dernières années qu’on ne sait plus comment classer nos boites : par couleur, taille, thème, méca… Parmi toutes les catégories qui existent, j’avais envie de vous parler de celle qui, justement, nous interdit de le faire.
Les jeux à communication limitée
Si cette contrainte ne résume jamais la mécanique principale, elle contribue fortement à l’esprit du jeu en lui-même puisque, sans elle, la saveur serait toute autre. Chaque règle définira cette interdiction de manière tout à fait différente : On peut parler mais pas sur tout, on peut désigner, on peut mimer ou encore avoir une réaction physique (calme-toi je parle d’un haussement de sourcil, un rictus, un soufflement de nez genre mais il comprend rien cet abruti !).
Alors si tu rêves de partager un moment unique avec ton choubidou ou ta douce sans qu’il ou elle te brise le cerveau avec ses jacasseries que tu te fiches de de savoir comme s’est passée sa journée de boulot ; je t’invite à découvrir ma petite sélection.
5 jeux pour partager un moment dans le calme (par pitié)
50 missions
Dans ce coop’, un but à atteindre : la médaille d’or ! Et croyez-moi : les 2 paliers qui la précèdent à savoir le bronze et l’argent, ne vous satisferont jamais assez pour que vous arrêtiez là. Nooon ! Vous allez vouloir essayer encore et encore jusqu’à atteindre l’excellence !
Comment ça se présente :
Au centre de la table 4 cartes sur lesquelles vous allez devoir jouer en respectant la règle d’or : on ne peut poser une carte par dessus une autre que si elles ont 1 point commun (valeur ou couleur) comme au …? Vas-y dis-le je ne vais pas te taper : comme au Uno !
Sauf qu’au lieu de chercher à juste défausser ta main bêtement en embêtant le monde avec tes pièges qui n’amusent personne, là tu vas devoir faire fumer un peu le p’tit machin tout mou bien calé entre tes deux oreilles. Puisqu’à la vue de tous, sont également exposées 4 missions du style : il faut une paire de rouges accolées , le total des 4 cartes est égal à 20, Il doit y avoir plus de vert que de jaune (parce que « qui c’est les meilleurs évidemment c’est les verts » !).
Vous l’aurez compris : plus on remplit (gagne) de missions, plus on se rapproche des médailles et donc de la victoire. Bien évidemment la contrainte réside dans le fait que les cartes jouées ne reviennent pas dans notre main et que le stock s’épuise, il faudra donc calculer un peu son coup et optimiser son tour pour tenter plusieurs gains en une seule fois. Tout ça en… en quoi ? Bon sang c’est le titre, suis un peu ! En se taisant !
Enfin oui et non parce que dans 50 missions, on pourra quand même se donner des indications genre : si vous pouvez éviter de jouer là, où je peux remplir cet objectif au prochain tour patati patata mais pas le droit de dire ce qu’on a exactement en main (faut pas déconner non plus !)
50 Missions
- De K.Gruhl, illustré par R.le Maître ( de l’univers ? ok je sors…)
- Edité chez Oya
- De 1 à 4, dès 8 ans
- 17,50€
Level 10
Là encore un coop’ dont le but sera cette fois-ci de classer toutes les cartes dans un ordre précis et en respectant leur monde (couleur).
A quoi ça ressemble ?
A un tout mignon jeu vidéo de l’époque que t’en es nostalgique même si tu l’as pas connue sale menteur ! Il faut l’avouer, c’est trop mimi ces petits mondes colorés avec son héros et ses méchants tout en pixels ! Et vous n’avez pas tout vu : parce que si on met les cartes dans l’ordre sur la table, on découvre alors une fresque par monde (couleur), c’est trop craquant…. Et ce packaging ! On a tout de suite envie de tenir cette petite console entre ses minimes !
Bon, c’est pas le propos.
Dans level 10, les joueurs vont devoir se coordonner pour poser des cartes dans les 5 mondes différents (couleurs) en respectant l’ordre croissant imposé mais aussi (et surtout) le fait qu’on ne peut pas avancer dans un monde si les précédents n’ont pas atteint le même niveau (en gros tu peux pas poser une carte dans la deuxième colonne si il n’y a pas une carte de chaque couleur dans la colonne précédente). Donc on fait gaffe à l’ordre dans les lignes et à l’avancée de chaque colonne.
T’as rien capté ? C’est normal, faut y jouer pour saisir (et là t’as même pas les p’tites subtilités de la mort). Tout ça encore une fois en ne pouvant s’exprimer que sur « j’ai 3 cartes mauves », « il faut absolument me laisser jouer dans le monde vert (« qui c’est les meill… ») etc.
Level 10
- De H.Hayashi, illustré par F.Coda
- Edité chez Matagot
- De 1 à 5, dès 8 ans
- 9,90€
The Game
Des exemplaires de The Game il y en a plein : un plus accessible dans un écrin vert (« Qui c’est les meill… » Note de la direction : arrête, Mélanie), un spécial duo, un version extrême, un avec des dessins plus colorés mais que moi je continue de préférer les têtes de mort qui correspondent parfaitement à l’angoisse du jeu… ah oui donc là, pas le choix faut que j’explique :
Dans The Game, vous allez devoir tous ensemble jouer toutes les cartes, ouiiii tooouuutes ! (Encore un coop’ donc). Pour ce faire, à tour de rôle, vous devrez poser des cartes sur 4 piles au centre de la table. D’eux d’entre-elles exigent que les numéros soient joués en ordre croissant et les deux autres ?! En ordre décroissant, banane !
Oui bof pas ouf… genre si je pose le 99, sachant que les numéros ne vont pas au-delà, c’est foutu quoi, on a perdu ? Mais non, on va pouvoir ralentir le truc. Pour retarder l’échéance, vous pourrez reculer sur chaque pile de 10 en 10. Par exemple, sur la pile ascendante est posé le numéro 86, tu dois donc monter ?! Tu joues ton 99 (ok c’est plus grand, ça marche) mais tu as aussi le 89 que tu t’empresses de poser par dessus (on recule bien de 10) et si derrière tu joues le 79 là tout le monde t’acclame, t’es trop une bête !
On a vraiment le sentiment de se battre contre le jeu, d’où cette espèce d’angoisse qui t’oblige à garder les yeux fixés sur les piles prêt à crier que tu as LE numéro idéal pour faire un (ou plusieurs) bond(s) en arrière ! Car ici, vous ne serez évidemment pas autorisés à dire j’ai tel numéro ! Non non, seulement: « ne jouez surtout pas là », « est-ce que tout le monde est ok si je descend tout doucement ici ? » etc.
The Game
- De S.Benndorf, illustré par O. et S.Freudenreich
- Edité chez Oya
- De 1 à 5, dès 8ans
- 14€90
La marche du crabe
Toujours un coop’, oui mais en duo ! Et cette fois mon gars, va falloir la boucler pour de bon ! Sur la plage (abandonnée ! ) composée de cartes, de vilains détritus ont emprisonné les gentils petits crabinous que vous allez devoir délivrer. Originalité du truc : un seul pion pour symboliser les 2 partenaires qui devront le déplacer tour à tour ou pas d’ailleurs. J’t’explique (parce que je vois bien que tu commences à loucher) : l’un de vous ne pourra aller que de droite à gauche et l’autre de bas en haut. A son tour, un joueur peut se déplacer puis dépose un gros vilain tourteau. Et c’est à l’autre de faire exactement pareil.
Pourquoi se déplacer ? Pour aller sur une carte avec un détritus ce qui a pour effet de libérer une bestiole. Et qu’est-ce qu’ils font les vilains pas beaux ? Il te bouffent la crevette ! Et dans La marche du crabe, les crevettes c’est la vie ! (comme les coeurs dans Mario).
Des crabinous y en a de planqués derrière chaque objet gentiment délaissé par ces adorables êtres humains que nous sommes. Seulement voilà : vous en avez secrètement pioché deux sur lesquels il ne faut surtout pas s’arrêter (au risque de se faire à nouveau croquer la crevette). Et tout le sel (de la mer ah ah ) du jeu réside dans le fait d’observer les déplacements ou l’immobilité du partenaire mais aussi de déduire, en fonction de là où il pose ses tourteaux la direction qu’il souhaite nous voir emprunter.
Et comme si ça ne suffisait pas, l’auteur nous propose même un jeu en campagne ! Non ça ne veut pas dire que le jeu se joue soudainement avec des truies qui se roulent dans la boue ! Un jeu en campagne ça veut dire avec des scénarios qui se suivent, de nouvelles contraintes et des points de règles supplémentaires. Du challenge quoi !
La marche du crabe(inou)
- De J.Prothière, illustré par A. de Pins (créateur de la BD du même nom)
- Edité chez Opla
- 2 joueurs uniquement, dès 8 ans
- 13,50€
Tranquillité
On finit en beauté (et c’est rien de le dire) avec ce petit bijou de jeu coop’ (oui je sais, je l’ai répété à chaque fois mais j’aime bien, et puis ça fait des chapitres plus longs comme ça on a l’impression que j’ai beaucoup beaucoup de choses à dire dans mes articles très pros ! ) Ici on a une grille (imaginaire) délimitée par les cartes avec un joli petit navire et on va devoir, à nous tous, la remplir entièrement en respectant des contraintes.
Comment je vais t’expliquer ça ?
Alors déjà c’est simple : tais-toi ! Mais non pas là, dans le jeu je veux dire ! Parce que là on a absolument rien le droit de dire… du tout !
Chacun son tour, là encore, on pose une carte (ou on en défausse deux pour renouveler sa main mais bon je rentre pas dans les détails sinon je vais vous perdre ! ). Cette carte, vous la jouez où vous voulez dans la grille mais il faut savoir que quand celle-ci sera complétée, tous les numéros devront respecter l’ordre croissant depuis le coin inférieur gauche jusqu’au coin supérieur droit donc on fait pas tout qu’est-ce qu’on veut !
Autre chose, si la carte jouée en touche une autre, on calcule la différence entre leurs deux valeurs et on défausse obligatoirement autant de cartes de sa main que le résultat obtenu. Et là on n’a pas fini de t’entendre couiner parce que si c’est impossible alors tu joues pas là et si tu peux jouer nulle part, tu fais perdre tout le monde ! Mais comme c’est bien trop facile pour ton esprit calculateur et celui de ton enfant de 2 ans et demi surdoué avant d’être né, dis-toi que tu vas pouvoir ajouter tout un tas de variantes (incluses) pour diversifier tes parties et complexifier le tout !
Encore une fois Tranquillité fait partie de ces jeux qui ne peuvent réellement être compris qu’après une première session à la fin de laquelle celui qui vous fait perdre dit : « aaaah mais tu l’avais pas dit qu’on devait absolument respecter l’ordre à chaque fois ! » Voilà voilà, allez on s’en refait une ?!
Tranquilité
- De J.Emmerson, illustré par T.Rossin ( même que c’est beau à crever ! )
- Edité chez Lucky Duck Games
- De 1 à 5, dès 8 ans (mais pas au delà de 100 qu’y disent)
Quand je disais plus haut que ma sélection allait vous permettre de partager un moment calme, je rigolais évidemment… Oui parce qu’en vrai, si pendant ces 5 jeux là vous ne vous êtes pas déjà disputés au moins 260 (mille) fois, il y a peu de chance pour que votre couple résiste à la rancune qui aura déjà commencé à vous pourrir le coeur. Non parce que faut pas déconner, il l’avait bien vu ce satané tourteau, c’était quand même pas compliqué de comprendre qu’il fallait le contourner surtout qu’il ne restait qu’une seule crevette ! Moralité : continuez de saccager la nature c’est ce qu’elle mérite ! Ca va j’déconne, mais divorcez par contre ! Mais non rooo… Ne vous mariez pas ça finit toujours mal et ça bouffe le pognon que vous pourriez mettre dans les jeux !
Et en plus, t’as pas fait gaffe ?! Tu peux jouer à la plupart de ces pépites en solo ! Tu peux même les mettre dans ta valise et jouer dans le train qui t’emmène loin du domicile conjugal que tu quittes à cause d’une sombre histoire de conjoint qui s’est fait bouffer la crevette… Ce jeu là d’ailleurs tu peux le laisser chez toi parce que tout seul il n’aurait pas la même saveur (je parle de La marche du crabe hein ?! ) à moins d’avoir un dédoublement de personnalité et d’arriver à comprendre ce que ton autre te cache.
Et en parlant de jeu à deux dans lequel il faut déduire et fermer (encore) sa bouche, il y en a un que je n’ai volontairement pas mis là : Focus d’A.Boccara et R.Galonnier, illustré par S.Caruso (édité chez Oldchap). Je vous en parle prochainement alors continuez de me lire (et de vous taire surtout parce que je n’aime pas qu’on me coupe la parole) ! Il y a aussi le jeu Almost Innocent qui reprend ces principes de communication partielle !