Heredity est un jeu narratif et coopératif qui vous embarque dans un monde post-apocalyptique. Découpé en cinq scénarios personnalisés, un fil conducteur vous tient en haleine du début à la fin et lie le tout en une histoire cohérente. Je me lance le défis de vous le présenter et vous donner envie sans en révéler les secrets !
Le déballage
Si le visuel de la boîte est intriguant, le plaisir immédiat redescend d’un étage en l’ouvrant. En effet, à l’intérieur, pas de plateau à déplier ni de figurines qui pètent à la tronche ; simplement quelques paquets de cartes camouflées qu’il est interdit de zyeuter (interdit !) et des planches de vilains-méchants à dépuncher qu’on s’empêche également de regarder en détail pour ne pas se spoiler !
Alors forcément on peut être un peu déçu mais ce sentiment est de courte durée puisqu’il permet aussi d’apprécier pleinement la découverte qui doit se faire petit à petit. Comme si on vivait réellement l’histoire, tout se révèle au fur et à mesure sous les pas des personnages que l’on incarne et finalement, quelques éléments viennent apporter un peu de relief à l’ensemble.
Vous avez demandé l’apocalypse ? Ne quittez pas
Heredity c’est l’histoire d’une famille qui tente de survivre en totale autarcie dans un monde en déclin. Ce qui faisait autrefois la gloire d’une civilisation en matière de progrès et d’intelligence semble avoir cessé de fonctionner pour ne laisser derrière que des territoire dévastés et chaotiques où chacun essaie de se reconstruire.
L’espèce humaine retrouve son instinct primitif et prouve à nouveau qu’elle est capable du meilleur comme du pire pour protéger les siens et s’en sortir elle-même ! Dans Heredity vous aurez des choix à faire. Choix qui auront des répercussions : Etes-vous prêts à vous salir les mains ? Peut-on encore accorder sa confiance ? Parviendrez-vous à vous en sortir par vos propres moyens ?
L’essence d’un jeu d’aventure
Pour savourer pleinement l’expérience, je vous recommande de constituer un groupe de trois ou quatre potes volontaires pour s’engager sur environ 15h de jeu ! Détends-toi bonhomme, c’est découpé en chapitres donc tu cales-ça en plusieurs dates et c’est good ! Le mieux reste quand même d’enchaîner les scénarios de façon rapprochée pour ne pas perdre le fil de l’histoire même s’il y a un système de sauvegarde astucieux…
L’idée générale est bien sûr de remplir une mission que vous découvrirez dès les premières lectures. Pour ce faire, les quatre membres de la famille (qui seront tous utilisés à chaque partie quel que soit le nombre de joueurs) bénéficieront de points d’action limités à répartir sur sa fiche perso, j’y reviendrai plus tard !
Un scénario débute par une intro qui indique la mise en place (rapide) de quelques éléments puis tout se fera au fil des évènements et répercussions de vos actes.
Magne-toi chéri, on n’a pas toute la nuit !
Point important : une ligne de temps se dessine au centre de la table. Au dessus de celle-ci un jeton sablier trône fièrement et attend son tour pour avancer et vous envoyer tout un tas de difficultés dans les dents !
En effet, quand chacun de vous aura fait toutes ses actions, le sablier avancera de carte en carte sur cette ligne et des évènements se produiront : les gros méchants avancent et tartent, des trucs bizarres poussent de partout, un lieu devient inaccessible ou encore une information essentielle vous parvient…
Cette ligne de temps joue un rôle majeur dans les sensations de jeu : le stress vous tient en haleine et vous oblige à programmer intelligemment vos actions en anticipant ce qui risque de vous tomber sur le coin de la gueule !
Un p’tit conseil : N’hésitez pas à alterner vos actions (un coup toi, un coup lui), être attentif au texte pour ne pas mal l’interpréter : la narration est ici au coeur du jeu ! Et surtout : ne pas chercher à dézinguer à tout berzingue ! Détends-toi la nouille et arrête de vouloir buter tout l’monde (note à moi-même).
La communication est importante, en réalité personne n’est à vos trousses alors prenez le temps de la réflexion et partagez vos idées. Si t’as tendance à prendre un peu le dessus sur tout le monde, bah tu t’calmes parce que tu gâches l’ambiance et en plus tu nous fais perdre et si t’es méga timide, rappelle-toi qu’on est tous copains alors tu t’arraches un peu le fion pour nous sortir de là !
Des personnages taillés
Allez, je reviens aux perso et à leurs compétences. Voyez par vous-même sur la photo, chacun d’eux se découpe en 3 cartes : la tête, les bras, les jambes. Leurs points d’action sont répartis dessus et correspondent très logiquement aux fonctions premières des membres : observer/parler, saisir/ouvrir/prendre/se battre, marcher/explorer/faire une balayette.
Ces parties peuvent recevoir un nombre précis de coups avant d’être retournées face « blessure grave » ce qui impacte le nombre d’actions (là encore c’est logique : si t’es blessé à la patoune, tu cours moins vite…).
Et enfin, on peut recevoir des équipements que l’on vient accoler au personnage. Et là on dit merci ! Pourquoi ? Parce qu’il n’est pas question de gagner une arme un peu girly à paillettes pour la pouf de service et un super big flingue ultra cracheur de flammes de la mort pour les mecs ! Non ! Ici, on se répartit les objets intelligemment et en fonction de qui fait quoi ? Qui va où ? Et à qui il reste une mimine de libre ?
Ca fait plaisir !
L’univers n’a pas de limite
Un autre truc que j’ai trouvé méga agréable pour renouveler un peu l’expérience et nous éviter d’avoir la sensation de refaire la même chose à chaque fois : les paysages (vus du dessus, j’adore !) n’ont rien à voir les uns avec les autres. Un peu comme dans un jeu vidéo, on a l’impression de changer de monde à chaque partie.
Il y a plein de références cinématographiques qui apportent une petite touche nostalgique plutôt cool et participent, là encore, à nous faire vivre le truc réellement ! On croirait que ce sont nos propres souvenirs ! Pour ne citer que quelques exemples (et titiller votre curiosité !) : Mad Max, Matrix, 28 jours plus tard, Premier contact… Alors ça t’intrigue hein ?
Je ne suis pas autorisée à vous en dire plus hélas… Je risque ma vie en vous révélant tout ça (ceci dit, moyennant monnaie, on peut s’arranger !).
Une petite touche de hasard
Les combats ne se gèrent pas à coup de lancers de dés ici. On peut choisir de se battre au corps à corps : uppercut, high-kick, coup de surin, à toi de voir ou alors garder ses distances et envoyer une grosse bastos dans la tronche de son adversaire. Dans tous les cas, on sait en avance la portée du coup et sa force, on sait également, c’est indiqué sur la carte correspondante, quelle est celle de l’ennemi et sa capacité de défense.
Le p’tit piquant vient du fait qu’on tire, pour chaque attaque une carte Karma qui offrira (ou pas !) quelques points à ajouter (ou soustraire) à notre résultat. Autant vous dire qu’on couine pas mal parce que quand ça veut pas bordel de bordel… ça veut pas ! Heureusement, rappelons-nous que nous sommes une famille unie et que parfois c’est cool quand moumoune vient aider son fifils à finir cette ordure qui nous malmène depuis 3 tours !
Ma toute première fois
Je n’avais encore jamais tenté l’aventure du jeu narratif évolutif et je ne regrette pas l’expérience !
Certains points m’auront un peu dérangée, ou plutôt frustrée, comme le hasard du Karma (la poisse me colle au c…), le sentiment d’avancer un peu au pif parfois sans trop savoir comment optimiser ses actions ultra limitées pour limiter la casse et se préparer au mieux pour la suite des évènements ou encore le côté « game-over » : si tu foires un scénar’, t’es bon pour le refaire entièrement…
Ca c’est un truc qui m’a toujours empêchée d’apprécier les jeux vidéos, je ne suis pas hyper endurante sur ce point et refaire un scénario sans vraiment savoir ce que j’ai mal fait ne m’éclate pas ! Mais c’est un avis subjectif (le mien !) et tout le monde n’aura pas le même… Après, c’est un coop’ donc on peut aussi se mettre d’accord pour annuler des choix un peu hâtifs, rembobiner le film et s’arranger avec sa conscience plus tard ! (C’est ce qu’on a fait et on assume !).
En dehors de ces quelques détails, je suis méga heureuse d’avoir vécu ce truc ! Avec les copains, on a vraiment eu le sentiment d’avoir accompli quelque chose d’important à la fin et le débrief’ donnait l’impression qu’on se remémorait des souvenirs réels et des étapes plus ou moins agréables à traverser !
Heredity en quelques mots
Je dirais que l’essentiel à retenir c’est l’expérience vécue autour du jeu ! La proposition est riche, complète, soignée. On nous prend pas pour des c… !
Dans le cinéma, je ne suis pas fan des héros surdimensionnés avec des muscles qui leur poussent jusque dans le cou, des réflexes de droïde et des réparties à deux balles… J’aime au contraire les personnages charismatiques qui s’accommodent de leurs petits défauts et en font une force.
Ici c’est pareil, j’adore l’idée d’incarner une famille ordinaire soumise à rude épreuve et qui va devoir se servir de son expérience et apprendre à survivre coûte que coûte ! J’ai été Djamal pour quelques heures de ma vie : père de famille aimant et protecteur mais contraint de composer avec les limites physiques qui sont les siennes et cette peur viscérale de voir mourir les siens qui peut freiner comme donner des ailes en fonction de la situation !
J’ai surkiffé la sensation de course poursuite qui ne nous permettait pas un seul instant de répit et nous obligeait à rester attentifs, les sens en alerte !
Les différences et petites touches originales de chaque scénarios (top secrètes !), les mini-jeux dans le jeu (hmmm quel régal !) mais surtout, surtout… les échanges improbables autour de la table : « A votre avis : j’me crève les yeux ou j’me blesse le blouson ? », « Tu prends les pompons et moi la grenade ? » « Attends, j’utilise mon troisième pied pour te rejoindre plus vite »… Autant vous dire que ceux qui ne sont pas dans le game vont sérieusement vous cataloguer !
En cas de doute et d’oubli : no problem ! La règle est très bien faite, on retrouve facilement l’info et puis le matos est de toute façon hyper ergonomique, les picto ultra limpides : c’est un sans faute !
Et enfin le finish… Touchant, un peu moralisateur aussi… Et surtout, là encore, adapté à vos propres choix ! Car OUI ! Il y a plusieurs fins possibles, et donc la possibilité de refaire le jeu du début ! Vous mettez un peu de vous dans ces avatars et le final dépendra de vos personnalités et choix moraux…
« Alors voilà petit l’histoire de l’être humain, c’est pas joli joli et j’connais pas la fin. T’es pas né dans un chou mais plutôt dans un trou qu’on remplit tous les jours comme une fosse à purin… Il faut que tu respires et ça c’est rien de le dire, tu vas pas mourir de rire et c’est pas rien de le dire »
#Mickey 3D
Mon petit doigt me dit qu’une suite est déjà en préparation… Ce serait dommage de ne pas être prêt à affronter tous les dangers alors foncez découvrir ce premier opus, vous m’en direz des nouvelles !
Heredity
- Un jeu de Jérôme Cance et Laurent Kobel
- Illustré par Tania Sanchez-Fortun et Aurélien Delauzun
- Edité chez Darucat
- Distribué par Blackrock
- Pour 1 à 4 , dès 14 ans
Merci beaucoup pour cette critique et ces conseils. J’ai la boite sous la main, lu les règles et on va bientôt commencer l’aventure.
J’ai eu le même ressenti vous lors de la discussion avec les auteurs. La mort obligeant à refaire le scénario de 0, pour un jeu narratif, ça va me frustrer cruellement.
Mais tous les autres points positifs font que je VEUX jouer à ce jeu.
Aaah ça fait plaisir ça ! Vous avez bien fait de ne pas vous arrêter à ce détail, l’aventure est quand même vachement cool en dehors de ce point ! Je vous conseille de bien lire les évènements et discuter entre vous pour vous répartir les actions. On était parfois un peu déconcertés à se dire « mais qu’est-ce que le jeu attend de nous exactement ? », erreur, fiez-vous à votre instinct et essayez de réfléchir comme si vous étiez à la place de vos perso !
Bonne partie… euh bonneS partieS !