J’ai eu l’occasion de retourner éprouver le gameplay d’Aeon’s End avec l’arrivée d’un pledge à la maison : celui de The Descent, dernier né de la collection Aeon’s End. Depuis le Legacy, Aeon’s End est mon jeu préféré, mais a-t-il su conserver ses qualités dans ce nouvel opus ? Voici ce qui nous est arrivé !
Friends & Foes
The Descent conserve le mode Expéditions d’Aeon’s End : chaque combat de Némésis est scénarisé (et toujours aussi osef tier), en mode Legacy, avec des enveloppes à ouvrir et une progression à travers les différentes missions. On découvre dans ces enveloppes :
- des nouveaux mages
- des nouveaux sorts, gemmes et reliques
- les nouvelles Némésis
- les nouveaux Friends & Foes
- des tokens et matériels liés aux nouveaux protagonistes
Vous l’avez vu dans cette liste, The Descent amène le concept de Friends and Foe’s : deux nouveaux protagonistes qui se rajoutent dans le tour de jeu. Le Friend va évidemment vous aider, tandis que le Foe participe à vous enfoncer. Chacun a son propre plateau, son deck de cartes, et ses propres mécaniques.
The Descent rajoute une surcouche de complexité en mixant les pouvoirs des Friends & Foes à ceux de la Némésis en cours. Et c’est un bonne idée à mon sens, puisque si vous aimez Aeon’s End, c’est pour sa difficulté, et ces deux plateaux rajoutent des éléments à l’équation que propose le jeu.
L’expérience Aeon’s End : douleur, susurre-moi ton nom à l’oreille
La raison pour laquelle j’écris cet article, c’est parce que j’ai toujours peur que cette série devienne trop populaire, ou trop flemmarde pour oublier son ADN. A mon sens, Aeon’s End est une sorte de jeu de deckbuilding puzzle hardcore, qu’il faut ABSOLUMENT jouer en difficile. Chaque Némésis ou presque propose un problème bien à elle, avec un marché de cartes prévu à l’avance, des mages prévus à l’avance. Et dans cet environnement contrôlé par les créateurs du jeu, vous devez trouver une solution.
Car le jeu va vous rouler dessus. Littéralement. Si vous ne trouvez pas la bonne stratégie, vous vous faîtes éclater par la Némésis. Vraiment, vous ne lui enlevez même pas un point de vie. Et vous vous dîtes que le jeu n’est pas équilibré, qu’il y a un problème.
La première fois que ça nous est arrivé, c’était pour le Legacy n°1. La Némésis nous avait tellement donné de fil à retordre qu’avec mes amis nous avions abandonné un soir après plusieurs roustes consécutives…Mais impossible de dormir sur cette défaite cuisante, donc on s’envoyait des messages dans la nuit, en reprenant chaque carte du marché, en essayant de comprendre nos erreurs. En planifiant.
Quand je dis planifier, ça veut dire planifier les trois premiers tours de chaque mage, ce qu’il joue, ce qu’il achète, ce qu’il fait. Car dans Aeon’s End on ne mélange pas son deck, donc on sait ce qui va sortir. Il s’avère que pour cette partie, nous avions trouvé le salut en laissant des étincelles sur les brèches ouvertes de l’un des mages, afin que sa main soit libérée de ces sorts nuls, et complètement tournée vers son économie d’Ethers. Son pouvoir lui permettait d’acheter une carte et la mettre sur le dessus du deck d’un autre mage, et c’est comme ça que nous allions grignoter le manque de vitesse de notre stratégie.
La Némésis allait plus vite que nous, et nous avions trouvé un moyen d’agir sur notre tempo collectif. Et c’était TELLEMENT satisfaisant. Vraiment on aurait pu rejouer dix fois la partie et gagner dix fois. On avait trouvé exactement ce que les auteurs du jeu avaient prévu.
Ce sentiment c’est vraiment ce que je recherche dans Aeon’s End. Je ne joue plus ces parties « ouvertes » où l’on peut composer son marché de cartes et assembler sa team de mages comme on le souhaite. C’est trop facile. Les Legacy et le mode Expéditions présent dans toutes les boîtes récentes montrent bien que les créateurs d’Aeon’s End l’ont compris aussi. Maintenant est-ce que c’est le cas dans The Descent ?
The Descent, The Infecter
7 défaites. De suite. 7x1h30 de pure lose. La première Némésis de The Descent, The Infecter est une plaie. Elle vous donne des cartes infections qui vous font défausser certaines cartes (gemmes, sorts, reliques) ou des charges. Mais vous pouvez choisir de perdre 1PV à la place. Ses minions sont horribles aussi et affectent Gravehold, votre village.
Pas le temps de se soigner, pas le temps de mettre en place les pouvoirs des mages. On essaye plusieurs combinaisons de mages, plusieurs sorties. On échoue. On ne trouve pas le tempo, ni la formule. On tente la stratégie full dommages, en achetant des sorts à dégâts. C’est beaucoup mieux, mais dès que les cartes Némésis niveau 2 sortent, elle nous poutre.
Alors on laisse passer une nuit. On réfléchit à d’autres choses. L’expérience du Legacy me fait dire qu’il y a une carte du marché qu’on utilise pas assez. Et on la trouve. Il nous faut un moyen de trouver du card advantage, de gagner du tempo sur The infecter. Et on la trouve. Elle était là sous notre nez, et on ne l’utilisait pas. Ou plutôt, un combo était sous notre nez.
Il fallait juste le voir, (ça c’est pas dur) mais surtout trouver un moyen de le setup correctement. Et ce combo était tout simple. Legacy Slayer et Coruscating Mirror. Un sort qui, préparé, vous donne une charge quand une relique est achetée. Et une relique qui, d’une part vous fait prendre des charges (en posant des jetons Electricité sur des minions), et d’autre part donne 1 Ether et fait piocher un allié.
Ca a l’air évident comme ça, mais sachez que si vous le faîtes sans optimisation vous perdez. Ca demande beaucoup de coordination dans l’ouverture des brèches et l’ordre des premiers tours.
Alex, le lendemain matin, réfléchit au meilleur start possible et le consigne sur son carnet ! Nous faisons donc une tentative en ayant le courage de mettre ça en place. Trouver un moyen de set-up ce combo en organisant decks, brèches et ordre du tour. Il faut garder des cartes en main pour certains, prendre un dommage pour d’autres afin de trigger une carte de départ.
L’idée globale est de prendre des charges gratuitement pour moins avoir à le faire plus tard, et de faire piocher + gagner un Ether à un autre joueur ensuite. Et…ça marche ! Dès les premiers tours, le tempo n’est pas le même, nous sommes moins submergés. En vrai, le Coruscating Mirror semble ok tier, mais acheté avec Legacy Slayer en place, ça devient complètement broken.
Nous avons roulé sur The Infecter quasiment sans le moindre dommage, et qu’est-ce que c’était bon ! Il existe peut-être d’autres façons de la battre, mais nous en avons trouvé une, qui fonctionne à chaque fois, et c’est grisant.
Le bonheur stratégique
Aeon’s End fait partie de ces jeux qui récompense l’expérimentation stratégique, et si vous n’avez pas peur de l’échec, c’est un truc dingue à vivre. Décoder cette Némésis nous aura pris entre 8 et 10h, mais ça valait vraiment le coup ! L’apprentissage s’est fait en plusieurs étapes, et chaque élément du gameplay est à optimiser. Les mages, les pouvoirs, les cartes du marché, l’ordre du tour : tout doit être considéré, tordu, analysé, déconstruit.
Ce qui est dingue, c’est la faculté qu’à ce jeu à toujours le proposer, quelles que soient les boîtes. Ca se joue toujours à un tour près, ça paraît toujours impossible et frustrant, et un jour, une carte sous-utilisée ou un combo apparaît. On s’engouffre dedans, et tout devient évident. Dans Aeon’s End il y a de l’aléatoire, mais cet aléatoire est complètement intégré. Il n’est pas injuste.
Et c’est ce qui rend chaque partie épique. Aeon’s End vous donne le contrôle sur 80% du jeu, et les 20% restants vous devez faire avec. Ce n’est donc pas un jeu sous forme de tableau excel, ni un jeu pour mathématiciens. C’est un jeu qui poussera votre réflexion dans ses retranchements, un mix de logique et d’expérience.
Nous avons enchaîné avec la 2e Némésis, qui nous a demandé moins de travail : la compréhension de notre dynamique de deck building nous a beaucoup aidés, acquise à la sueur du front lors du précédent combat. Il nous en reste quelques unes à affronter, vivement la suite !
Il y en a quelques boîtes chez Ludum, à mon avis il n’y en aura pas beaucoup d’autres disponibles !