Phénomène culturel et commercial, Skyjo fait un carton depuis des années. Entre son côté accessible, ses règles simples, son gameplay épuré, son prix et sa rejouabilité, Skyjo a trouvé une formule que tout le monde essaye de copier depuis. Sans plus tarder, voici ma critique et mon avis sur Skyjo !
Petite boîte, petit prix
Le premier atout de Skyjo, c’est peut-être son prix : environ 17€ en boutique. Si aujourd’hui ce prix semble tout à fait dans la norme, ce n’était pas le cas il y a quelques années, quand le jeu d’ambiance n’était pas autant sur le devant de la scène. Dans la boîte, on trouve un matériel très basique : 150 cartes, un bloc de score, une règle du jeu.
Esthétiquement, si la boîte se reconnaît de loin, le jeu ne propose aucune illustration. Des couleurs criardes, un fond mosaïque côté recto, un fond multicolore avec motif alvéoles au verso. La typo avec ombrage en creux + gros contour au centre, et dans les coins dans un ovale + ombrage. Pourquoi avoir mis 3 chiffres d’ailleurs sur une carte ? Mystère. Il n’y a d’ailleurs pas de graphiste crédité sur le jeu.
Du côté du livret de règles, aucun effort de mise en page, mais ça tient en trois petites pages.
En bref, Skyjo est tout simplement immonde, mais il reste très lisible.
C’est quoi Skyjo ?
Pour les personnes qui n’ont pas encore joué à Skyjo, voici un petit résumé du jeu ! Skyjo propose des cartes dont la valeur est contenue entre -2 et 12. Vous allez piocher 12 cartes, et les placer face cachée devant vous, sur 3 lignes et 4 colonnes. Le but du jeu est d’avoir le plus petit total à la fin de chaque manche, en additionnant les valeurs de vos 12 cartes. Le premier à 100 points déclenche la fin du jeu, et le vainqueur est le joueur avec le plus petit total.
A chaque tour, vous allez piocher une carte (soit de la pioche, soit de la défausse) et échanger cette carte avec une carte de votre jeu : soit une carte face visible, soit une carte face cachée. Vous pouvez aussi défausser la carte piochée, pour révéler une de vos cartes qui était face cachée.
Vous allez donc essayer d’obtenir les cartes de plus faible valeur possible, mais avec une petite règle spéciale : si vous avez une colonne avec des cartes de même valeur (exemple : une colonne de cartes de valeur 10), vous pouvez supprimer la colonne en question !
Le gameplay de Skyjo orbite donc entre recherche de cartes de faible valeur, et suppression de colonnes. C’est simple, ça se comprend en 5 minutes et c’est universel.
Les sensations de Skyjo
Skyjo a tous les ingrédients du jeu populaire : lisible, accessible, et hasardeux : le jeu ne récompense pas le plus gros cerveau de la table, mais il distribue les victoires au gré de la pioche. Bien sûr, un peu d’opportunisme et de réflexion sont au rendez-vous, mais entre la distribution des 12 premières cartes, la pioche et ce que les joueurs laissent dans la défausse, on a peu de contrôle sur le jeu.
C’est vraiment super facile à jouer : on pioche, on remplace ou on découvre une carte, et c’est au joueur suivant. Un tour dure 10 secondes, une manche 5 minutes.
Et c’est en partie pour ça que ça marche. C’est chaotique, votre grand-mère peut gagner une partie et le petit cousin de 7 ans celle d’après. C’est en ce sens que Skyjo a gagné les faveurs du public, en condensant les ingrédients d’une formule prête-à-jouer : hasardeuse, automatique, passive. On se laisse guider par la pioche, une manche dure 5 minutes, on compte et on en refait une.
Skyjo c’est pour qui ?
Skyjo est donc accessible, facile à jouer et universel : pas de texte sur les cartes, pas d’équations complexes ou de stratégie intimidante. On peut jouer à Skyjo et discuter, le jeu n’étant finalement qu’un prétexte pour passer du temps ensemble.
Autre point fort de Skyjo : il est jouable dès 8 ans (dès qu’un enfant sait compter en vrai) et se joue jusqu’à 8 joueurs. Son côté universel comprend donc aussi le spectre large de personnes qui peuvent y jouer, et y jouer en même temps. Puisque le hasard décide de tout, il n’y aura pas de différence de niveau autour de Skyjo.
Skyjo sera donc particulièrement adapté si :
- vous ne connaissez aucun jeu, et souhaitez commencer à jouer à des jeux de société modernes
- si vous souhaitez mettre vos proches autour d’un jeu
- si vous cherchez un jeu facile et accessible jusqu’à 8 joueurs
- si vous cherchez un jeu sans trop d’interaction où chacun fait son petit tableau dans son coin
En revanche fuyez Skyjo si vous êtes à la recherche de stratégie et de profondeur.
Pourquoi ce succès ?
Le succès stratosphérique de Skyjo est quasiment incompréhensible. Il existe des dizaines de jeux meilleurs que lui dans sa catégorie. Skyjo est moche, hasardeux au possible, et il a bénéficié de la méconnaissance du public de la niche jeux de société. Mais les succès grand public sont rarement des succès critiques, que ce soit dans le cinéma ou la musique.
C’est tombé sur Skyjo, c’est comme ça. Tous les éditeurs essayent de reproduire ce succès, avec des jeux de cartes pas chers et volontairement épurés : pas d’illustrations, pas de texte, que des nombres, règles simples et mathématiques. Mais Skyjo garde le cap, il est tellement installé dans les familles que son effet boule de neige semble sans fin.
Skyjo reste une superbe porte d’entrée vers les jeux de société modernes. Pour une famille qui ne joue pas, ou qui joue à ce qu’elle trouve en supermarché, c’est à dire du Monopoly ou du 1000 bornes, Skyjo c’est super frais. Skyjo apporte avec lui une bonne dose de fun et de plaisir immédiat, sans être trop répétitif ou trop long.
A cet égard Skyjo a fait beaucoup pour la cause des jeux de société : il ramène des gens en boutique spécialisée, et il ramène l’envie de jouer, là où d’autres jeux sont un calvaire de fêtes de famille : trop longs, trop pénibles, insatisfaisants.
Plaisir immédiat
Au final Skyjo est un jeu qui a su trouver (involontairement) une formule qui satisfait beaucoup de joueurs. Des règles simples, une durée courte, un jeu pour toute la famille. Comme je l’entends tous les jours dans ma boutique : « un jeu pas prise de tête« . Et si son immense succès reste difficile à analyser, il fait partie de ces jeux grand public, qui trouvent en lui un moyen de jouer immédiatement, sans avoir à connaître trop de codes ou de mécaniques du jeu de société.