Les illustrations d’un jeu de société servent deux objectifs : aider les joueurs à se projeter dans un univers, une ambiance. Et déclencher un achat. Vitrine du produit, la couverture doit en dire assez mais pas trop, et se démarquer dans une production faramineuse de 1500 jeux par an (en France). Voici les 10 couvertures qui ont eu le plus d’effet sur moi, et c’est l’occasion de parler des artistes qui les concoctent…
Attention, je vais parler des couvertures de jeux, pas de l’ensemble des illustrations qui le composent. Car parfois un jeu peut avoir des composants magnifiques mais une couv’ ratée ! Cette sélection n’a pas d’ordre particulier non plus, j’ai prix mes 10 préférées.
Heat – Vincent Dutrait
Je commence avec notre Vincent Dutrait national, l’illustrateur de génie qui nous a gratifié d’oeuvres majeures. Plus de 200 jeux à son compteur, et quel portfolio ! Pour moi, sa couverture de Heat est l’une des meilleures jamais dessinées : l’impression de vitesse, la composition, le côte rétro magnifiquement saisi, les lignes de fuite et les couleurs…On sait qu’on va faire la course, qu’il y aura des risques à prendre !
A mes yeux les traits de Vincent se matérialisent dans un héritage direct de la BD Franco-belge. Il y a cette poésie, cette constante émotionnelle dans ses personnages, cette vie qu’il leur donne, ces regards toujours réussis, qu’ils soient humains ou animaux. On a tous plus ou moins grandi ludiquement avec les illustrations de Vincent Dutrait (Jaipur, Madame Ching, Augustus, Dragon Run), et une poignée de ses couvertures pourraient figurer dans ce top. Car réussir des illustrations c’est une chose, mais une couverture c’est comme un logo : ça a ses codes propres, ses enjeux. Et Vincent Dutrait les maîtrise à la perfection.
Les autres couv marquantes de Vincent Dutrait
Il y en aurait plein à mettre, j’ai retenu ici les Tribus du Vent, Lewis & Clark et Lueur, mais j’aurais pu mettre aussi Oltrée, Dragon Run, Jaipur, Madame Ching…Dire que Dutrait a le sens de la composition est un euphémisme.
Wingspan – Beth Sobel
Si une autre personne pourrait placer plusieurs covers dans ce top à mes yeux, ce serait Beth Sobel. Avec en tête de proue son oiseau de Wingspan, couv’ absolument magistrale, qui a largement contribué au succès du titre. L’approche naturaliste et scientifique, tout en gardant une extrême douceur dans les couleurs, donnent à Wingspan un feeling unique. Un joueur sur deux affiche cette cover dans sa ludothèque !
Les autres couv’ démentes de Beth Sobel
En travaillant en boutique je peux vous dire que Calico se vend simplement avec sa couv’. Tout est parfait. Et Cascadia, un poil moins réussie au niveau de sa couv’ est tout de même remarquablement illustré au niveau matériel.
La Famiglia – Weberson Santiago
L’un des artistes les plus en vue dans le jeu de société s’appelle Weberson Santiago, et son style est reconnaissable immédiatement. Avec ses traits rugueux, ses textures, ses couleurs contrastées, Weberson décrit ses mondes de manière organique, anguleuse. Et souvent ça fait mouche, comme cette cover de la Famiglia, pimpante, abrutissante de soleil. Une peinture, en volumes et volutes. Vous êtes en Sicile, directement.
Les autres covers zinzin de Weberson Santiago
Quasiment chacune de ses couv’ sont un tableau. Du rétro baroque de The Great Split et des bâtiments de Flatiron, à ses paysages façon Famiglia ou Sail, ou l’extraordinaire Dracula qui se démarque en rouge des humains de Dracula VS Van Helsing…
Voidfall – Ian O’Toole
Impossible de faire un top sans inclure l’artiste australien Ian O’Toole, capable de conduire des projets extrêmement variés. Un jour un Carnégie tout en beige rétro américain, le lendemain un très fin anthropomorphisé Rédac Chef, et le sulendemain un Voidfall ultra futuriste. Ses talents sont multiples, ses illustrations une garantie que le jeu crache son thème de manière efficace.
Les autres covers quali de Ian O’Toole
Dans Carnegie la restitution du monde industriel et du chemin de fer est faramineuse. Chaque élément, chaque plateau est de toute beautay. La cover d’On Mars donne envie de tester le jeu immédiatement. Quand à Pampero, il faut le voir trôner sur les étagères d’un magasin, dans sa boîte immense et intimidante. Le travail de O’Toole que je trouve le plus abouti reste Rédac’ Chef, dommage pour cette couv’ un poil moins épique, mais les illustrations et fausses publicités du jeu sont géniales.
Leaders – Naïade
La France a ses artistes polyvalents de talent et Xavier Gueniffey Durin, dit Naïade, en est le fer de lance. Auteur sur un catalogue de jeux inouï, et des boîtes historiques à son actif, Naïade nous fait grâce encore en 2025 de ses talents. La couverture de Leaders est triomphale, englobant ses personnages dans une même forme, soulignée par une typo magistrale.
Les autres covers épiques de Naïade
Vous ne le savez peut-être pas, mais Naïade a participé aux illustrations de…Labyrinthe, en 1986. Moi je l’ai découvert dans Taluva, Tokaïdo, Yokai No Mori, Xidit, Sobek et dernièrement ses vikings de Looot ont fait mouche, tout comme son travail dans Diferencio.
Sleeping Gods – Ryan Laukat
Ryan Laukat est un créatif multifacettes, qui signe à chaque fois le gamedesign, les illustrations et parfois même l’OST de ses jeux. On peut donc lui pardonner son inspiration parfois inégale (à mes yeux en tout cas). En revanche, la cover de Sleeping Gods est absolument faramineuse, épique, digne d’être encadrée. La colorimétrie, la composition, les suggestions : tout fonctionne à merveille.
Les autres couv sémillantes de Ryan Laukat
Je les trouve toutes un cran en-dessous de Sleeping Gods, mais elles ont quand même un feeling bien à elles. A chaque fois Ryan Laukat veus nous embarquer dans une aventure avec un monde caché, un antagonisme qui ne se révèle qu’en creusant. Je remarque aussi que la couv’ de Sleeping Gods Distant Skies est bien moins bonne : l’orientation du titre Distant Skies ne respecte pas les mêmes vecteurs de déplacement que celui l’avion
Everdell – Andrew Bosley
Le travail d’Andrew Bosley sur Everdell est juste fantastique. On pourrait mettre toutes les couv’, toutes les cartes, et sa façon d’illustrer ces peuples et lieux de la forêt sont uniques.
Les autres couv’ noisette papillon d’Andrew Bosley
Toutes les boîtes d’Everdell montrent une autre facette du talent d’Andrew Bosley. Même pour Flock Together on reste dans ces mêmes traits reconnaissables, cette façon de donner des expressions humaines aux animaux.
Tainted Grail – équipe interne Awaken Realms
Le problème avec Awaken Realms c’est que leurs jeux sont si imposants qu’il leur faut une équipe interne de 10 graphistes/illustrateurs pour gérer les visuels de leurs jeux. Toujours est-il que la cover de Tainted Grail est un délice de calice dark fantasy, qui vous emmène immédiatement dans le brouillard d’Avalon.
Les autres dingueries de cover chez Awaken Realms
Avec 10 millions par projet sur Gamefound, Awaken Realms peut mettre les moyens sur les visuels, et ça se voit à la mort, avec des covers comme celles d’Etherfields, ou d’ISS Vanguard.
Flipships – Kwanchai Moriya
Deux raisons de mettre cette cover dans le top :
- son ambigramme Flipships tout juste délicieux
- sa composition graphique qui induit ce renversement des pôles
Un véritable masterclass de cet artiste américain, qui a le don d’évoquer le gamedesign du jeu dans ses covers !
Les autres masterclasses de Kwanchai Moriya
Bien qu’il manque à chaque fois un peu d’épure ou un je ne sais quoi pour les rendre inoubliables, les covers de Kwanchai Moriya sont toujours qualitatives. Apiary est un peu chargée à mon goût, et la typo ratée. Empire’s end aussi un peu surchargée, mais la fenêtre sur le passé ça marche tellement bien !
Iki – David Sitbon
Un français pour finir cette sélection avec David Sitbon, homme à tout faire chez Sorry We Are French, et surtout illustrateur de talent. J’ai hésite à la mettre dans ce top car je trouve que ses covers sont un poil moins bonnes que ses illustrations in-game. Iki par exemple regorge de visuels magnifiques, celui de la cover est un peu moins défini (mais ça reste superbement composé).
Les autres bangers de David Sitbon
J’aime beaucoup son travail sur tous les jeux qu’il touche. De Zhanguo, classe à mourir, à Galileo (+ Demeter), en passant par Shackleton Base, c’est vraiment très fort dans la variété des thèmes, époques et style. Mais c’est sur Gosu X, à la couv’ complètement sans vie, que David Sitbon m’a estomaqué !
Mention spéciale : Root – Kyle Ferrin
Difficile de ne pas mentionner Kyle Ferrin dans un top sur les illustrations de jeux de société. Et pourtant, même si je suis assez friand de son travail global, je trouve que ses covers sont un cran en-dessous ! Celle de Root a une composition un peu statique, celle de Oath manque de punch, et celle d’Arcs veut dire trop de choses en un seul visuel. Attention, on reste dans le heut du panier, mais il leur manque un chouïa à mon sens.
Quel est votre top personnel ?