On l’a tous vécu ce moment de solitude et d’espoir quand après un lancer de dé ce dernier se retrouve à moitié à cheval sur un pion, un tapis ou n’importe quel objet sur la table. Cassé ? Pourquoi ? Comment ? Accepter le résultat, ou relancer surtout si le résultat de nous arrange pas ?
L’angle
Certains pensent que l’importance de l’angle que prend un dé à cheval sur un obstacle détermine si il est cassé ou pas. Ainsi un dé qui serait à cheval sur un objet fin, comme un tapis ou quelques cartes ne serait pas cassé, car son angle ne laisse aucun doute sur la face du dé majoritairement visible. En revanche, un dé qui est tellement penché qu’on ne sait pas déterminer quelle face prédomine serait lui vraiment cassé.
Mais comment juger le degré de cet angle ? Y’a-t-il une valeur légale ? 45° ? Comment le mesurer ?. C’est de là qu’une théorie folle et une pratique est née dans certaines contrées : celle du dé par-dessus. Obscure et probablement mise en place par des gens qui disent chocolatine, cette règle consiste à placer un dé sur le dé cassé, pour constater si celui-ci glisse et tombe, ou si il reste en place. Le verdict étant que si le dé-chapeau tombe, alors le dé est cassé.
Mais comment mesurer la dextérité de celui qui pose le dé du dessus ? Probablement à l’aune de la favorabilité du résultat…
Le cas des jeux de rôle
Le problème de l’angle est aussi un problème un peu considéré par-dessus la jambe par les joueurs de jeux de société, à cause du d6. Ce d6 cubique, basique, sans surprise. Les rôlistes doivent eux composer avec des d3, des d20, des d100 dont les formes biscornues bouleversent la vision euclidienne des joueurs de d6. Les rôlistes lancent des pyramides inversées, des rhombododécaèdres concaves, des stellations alambiquées qui foutent en l’air les notions d’angle. Alors hein.
La sortie de piste à dés
Autre domaine corrélé sur la validité ou pas d’un jet de dé, c’est le lancer qui sort d’une piste à dés délimitée. Lancer valide ou pas ? A moins que vous ne soyez complètement malhonnête, la règle de bienséance voudrait que le dé soit relancé.
D’autres plus sévères diront que le dé est carrément annulé, sauf si le jeu exige un résultat. Une sorte de punition à la dextérité, marque d’un manque de confiance en soi et d’un besoin de gagner un peu trop exacerbé. Tips Campustech : un petit hug pour cette la personne, elle en a besoin.
Le dé tombé par terre
Autre règle, autre problème majeur : le dé qui tombe de la table. Difficile d’énoncer une loi stricte, car la jurisprudence du pile ou face fait de l’ombre au jet de dé. Le sol est-il exclus du hasard ? Le monde est il déterministe dès le bord de la table franchi ? Est-ce de la superstition ? Le dé avait-il autant de chances de faire le même résultat à table ? Doit-on appliquer le théorème du dé de Schrödinger ? Ne pas regarder le dé tombé au sol pour ne pas influencer le résultat du dé relancé sur la table ?
Imaginez un d6 qui tombe par terre et qui affiche 6. A-t-on autant de chances de faire 6 à nouveau ? Ou a-t-on usé la chance du dé ? Rappel : les lois des probabilités sont distordues autour d’une table, a fortiori autour d’une table de rôlistes.
Anecdote perso : à ma table de jeu de rôle, une jurisprudence étrange, partant d’une blague, a été mise en place : si un dé tombe par terre, le joueur peut alors prendre connaissance du résultat de ce jet de dé, puis annoncer si il souhaite le relancer ou pas. C’est tellement débile mais tellement drôle que c’est resté et accepté par tous les MJ de mon groupe.
La distinction avec les jeux coop
Ce qui amène mon autre argument : pour les jeux coop, dont les jeux de rôle font partie, la tolérance pour l’angle du dé cassé est plus élevée. Un dé cassé ne l’est que si le résultat est défavorable pour les joueurs. Sauf pour les joueurs qui aiment souffrir, ceux qui jouent les persos de soutien par exemple. Pourquoi ça marche ainsi ? Car dans un jeu coop, le jeu, l’adversaire représente le système, l’autorité, et les humains se sentent solidaires contre lui. On peut tricher contre une machine, elle n’a pas de sentiments !
Une solution universelle
Après des heures de brainstorming j’en suis arrivé à une solution universelle qui marchera à tous les coups : jetez vos dés par terre directement. Certes c’est un peu long, certes on les paume un peu parfois, certes le voisin du dessous se demande pourquoi vous avez subitement entamé une collection de gravier en ayant parkinson, mais cela évite de relancer les dés.
Mais attention ! Si en jetant un dé par terre il remonte sur la table par un rebond formidable et inattendu, considérez-le comme cassé. Relancez-le alors dans une piste à dé trois fois de suite, et faîtes la moyenne des 3 résultats, arrondie à l’entier supérieur les jours en -i, et à l’entier inférieur pour les joueurs qui s’appellent Michel.
L’importance de la mauvaise foi
Un dé cassé est un dé qui a rencontré un obstacle, et dont le résultat ne nous arrange pas. L’important c’est la cohérence : chez moi, tout dé qui n’est pas arrêté sur une surface parfaitement plane est considéré comme cassé. Ainsi, pas de place pour le doute, pas de discussions, pas de palabres et de questionnements métaphysiques. Le dé est cassé, point. Sauf si c’est moi qui l’a lancé, bien sûr.
Cet article a été inspiré par un post de Fred Dod sur la communauté des ludistes francophones.
Merci 😉