Après un Faraway l’année dernière couronné par l’As d’Or initié et des ventes en magasin pharaoniques, j’attendais avec impatience son successeur de la part de Catch-Up Games, la maison d’édition lyonnaise. D’une part parce que je trouve que leurs choix graphiques et éditoriaux ont une pertinence assez inouïe, et d’autre part parce qu’il est très difficile d’enchaîner deux bangers. En voyant la boîte de Courtisans, on comprend assez vite que le jeu a pas mal d’ingrédients pour devenir un carton, mais qu’a-t-il dans le ventre ? Voici mon avis et ma critique de Courtisans !
Courtisans, un standard éditorial
Je commence par le plus évident : Courtisans est non seulement très soigné graphiquement, mais tout dans son édition frôle la perfection. La boîte est parfaite, le matériel est parfait, l’ergonomie du jeu aussi. Catch-Up prend du skill éditorial à chaque jeu j’ai l’impression, et Courtisans incarne cette expérience. Voici quelques exemples de ce que vous trouverez dans Courtisans :
- Des choix typographiques aux illustrations, en passant par l’iconographie, tout est maîtrisé et la proposition est claire
- Les règles font deux pages et sont limpides
- Les cartes sont douces ET dorées, un plaisir tactile et visuel
- Le gameplay est épuré, il n’y a rien de superflu : pas de tokens, de règles de complexifications inutiles
- Le tapis en tissu de la Cour de la Reine est une super idée, et bien réalisée de surcroît
- Le jeu se sort bien, se range bien
- Tout ça à moins de 20€
Car c’est là la prouesse de Courtisans : réussir à intégrer tous ces ingrédients dans une recette parfaite de gamedesign et de production, en restant sous la barre des 20€ ! 90 cartes Courtisans format Tarot, 20 cartes standard pour les Missions, 1 tapis et 1 règle du jeu. Très fort. Je trouve que le jeu a une vraie tronche, il ne ressemble pas à un autre. Il intègre des petits plus comme un QR Code vers une vidéorègle, il est pensé pour les daltoniens.
Graphiquement, même si le jeu ne tape pas exactement dans ce que j’aime, il faut reconnaître que tout est bien réalisé. Des illustrations intégrant la maison des Courtisans, au dos des cartes, jusqu’aux cartes missions, le soin apporté aux détails est extrême. L’iconographie des cartes courtisans qui ont un effet est claire, contrastée. Et le jeu a une espèce de sensation globale agréable, visuelle et tactile : beauté graphique, douceur des cartes, déroulement du tapis, et fluidité du gameplay.
Mais bon, après avoir bien étalé cette confiture de compliments sur la tartine de Courtisans, voyons si le jeu en lui-même est aussi délicieux !
Lumière et disgrâce
Dans Courtisans les joueurs vont user de leur influence à la Cour de la Reine pour mettre des familles en lumière, ou au contraire les faire plonger dans la disgrâce. Shaaaaaaame. C’est avec ce feeling à la Game of Thrones que le jeu se déroule. A chaque tour, vous avez donc trois cartes en main : des Courtisans de chaque famille présente. Vous allez devoir jouer :
- une carte devant vous, en faisant des colonnes pour chaque famille
- une carte chez un autre joueur
- une carte à la cour de la Reine, soit du côté Lumière (en haut) soit du côté Disgrâce (en bas)
Courtisans est un jeu de majorités, puisqu’à la fin de la partie les cartes devant vous compteront comme 1 point si leur famille est en Lumière à la Cour, et compteront comme 1 point négatif si leur famille est en Disgrâce.
Evidemment, quelques effets de cartes viennent donner un peu de profondeur à ce gameplay :
- des espions, toujours posés face cachée, que ce soit chez vous, à la Cour ou chez un autre joueur : ils sont révélés à la fin de la partie
- des assassins, qui tuent une carte là où ils sont posés (y compris des espions)
- des gardes, protégés de l’assassinat
- des nobles qui comptent comme deux cartes dans les majorités
Aussi, des cartes Mission vont vous donner deux objectifs à atteindre pendant la partie, par exemple posséder 4 gardes, ou que telle famille soit en disgrâce…Chaque carte Mission réussie vous donne trois points à la fin du jeu.
Et…c’est tout. Une partie de Courtisans dure entre 10 et 20 minutes, selon le nombre de joueurs. Le jeu est au moins deux crans de difficulté et de complexité en-dessous de Faraway, on pourrait même dire que c’est un jeu d’ambiance ? Très chaotique à plusieurs, on gagne du contrôle quand on se rapproche du 2 joueurs.
Le gros avantage de cette mécanique réside dans son accessibilité. Facile à jouer, fluide, on comprend tout de suite là où on va.
Son seul défaut à mon sens réside dans le côté aléatoire du choix de l’adversaire à qui vous donnez une carte. Ca devient moins stratégique et logique et les joueurs ont tendance à punir un joueur par moquerie ou pour faire rire la table.
Les fourberies de Catch-Up
Courtisans a une proposition limpide et simple dans son exécution. On pourrait lui reprocher son manque de complexité pour contenter les joueurs aguerris, mais on ne peut pas reprocher à Catch-Up de viser le public majoritaire actuel, ou d’avoir un jeu qui embrasse la tendance globale qui lorgne vers des jeux simples et rapides. Parce que tout ça, Courtisans le fait à merveille. Il va cartonner dans les bars à jeux, il va cartonner dans les soirées jeux en boutique.
Si vous vous attendez à un jeu peu stratégique, de contrôle, vous vous trompez : Courtisans est un jeu de fourberie, de coups bas, il est fait pour se marrer, alors que sa robe lui donne plutôt une tronche de jeu initié/expert.
Mon avis sur Courtisans
Courtisans est une franche réussite. Sa proposition éditoriale est juste sensationnelle de maîtrise. Son gameplay est d’une limpidité parfaite. Mon seul regret est qu’il ne s’adresse pas vraiment à moi : je suis triste comme les pierres et relou comme la gravité, je ne suis pas client des jeux d’ambiance. Mais même en sachant ça j’ai enchaîné les parties avec plaisir. Je pense qu’il faut y jouer à 2 ou à 3 maximum si vous cherchez un peu de contrôle et moins de chaos.
En tout cas ce serait une shaaaaaaaaame de ne pas le tester par vous-mêmes !